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La transition énergétique comme levier d’optimisation et de valorisation immobilière

Publié le : 3 janvier 2022

La Poste Bourseul, dans le 15ème arrondissement à Paris, est un bâtiment remarquable, construit dans les années 30 par l’architecte renommé Michel Roux-Spitz. Bien qu’entretenu au fil des ans, ce vaste ensemble de 31 000m2 est aujourd’hui confronté à un état général qui ne correspond plus totalement aux objectifs de confort des usagers et aux normes énergétiques à venir. C’est pourquoi, avant d’entamer de nouveaux travaux, le propriétaire de l’immeuble, Poste Immo a souhaité une étude architecturale urbaine et énergétique pré-opérationnelle.

 

Pour mener cette réflexion globale, le cabinet Alu Architectes, plutôt que d’intervenir seul comme il est couramment d’usage, a préféré constituer une équipe transverse, pertinente et experte sur les spécificités et complexités de son client :

– AI Environnement pour l’environnement et l’énergie;

– Sébastien Cord architecte pour l’analyse patrimoniale, historique et technique;

– Alu Architectes pour la synthèse pré-opérationnelle, la technique et les estimations de travaux.

 

Cette étude conjointe porte sur trois axes principaux : la remise aux normes énergétiques, l’adaptation au confort des usagers et la valorisation du patrimoine architectural.

Une mise aux normes énergétiques qui s’inscrit dans le cadre du décret tertiaire

Dans un premier temps, le bureau d’études tripartite a procédé à une analyse technique de l’existant et des usages qui en sont fait. Et, dans un second temps, en a tiré des axes d’amélioration sur le long terme. Premiers leviers d’action retenus : les menuiseries et les toitures.

 

Des menuiseries responsables de 30% des défaillances énergétiques

 

Les châssis des menuiseries de la Poste Bourseul sont composés de pas moins de sept matériaux différents :

– du fer et du bois lors de la création du bâtiment;

– de l’acier en 1960;

– de l’aluminium en 1970;

– à nouveau du bois en 1980;

– du PVC en 1990;

– du thermolaqué en 2000.

Certains matériaux ont moins bien résisté que d’autres au temps et surtout aux transformations successives. C’est tout particulièrement le cas des châssis en acier et en bois d’origine.

L’intégration de double vitrage a semble-t-il généré des infiltrations et des corrosions actives. Celles-ci ont été aggravées par l’ajout de revêtements étanches. Ces derniers ont réduit la perméabilité des châssis et ont enfermé l’humidité sous une couche étanche alors qu’ils étaient censés les protéger.

 

Des toitures endommagées au fil du temps

 

Les problèmes de toitures représentent quant à eux 18 % des pertes énergétiques du bâtiment. Ils sont essentiellement liés à des problèmes d’infiltration et de dégradation voire déformation de la couverture en zinc sur tasseaux installée lors de la surélévation effectuée dans les années 1980.

 

Un cadre juridique et environnemental en cours de construction

 

Véritable labyrinthe, relevant parfois du parcours du combattant, les réglementations en matière d’énergie sont en constante évolution. Afin de permettre à Poste Immo d’avoir une vision globale et sur le long terme, le bureau d’études a fait des projections des contraintes réglementaires et environnementales allant au-delà des quatre voire cinq années de visibilité disponibles actuellement.

 

 

À l’écoute des usagers                                                                                                       

De l’importance de la température ressentie

 

850 personnes travaillent à la Poste Bourseul, réparties sur 6 étages, un rez-de-jardin et un sous-sol. Muni de grandes baies vitrées, l’édifice est soumis à des surchauffes en période estivale et des effets parois froides avec infiltration d’air l’hiver.

A cela s’ajoute une ventilation de l’ensemble du bâtiment qui s’est dégradée avec le temps. Prévue à l’origine pour être essentiellement manuelle, cet usage a été progressivement abandonné en raison du mauvais état des menuiseries rendant impossible l’ouverture de certaines fenêtres. Un système parallèle de grilles de ventilation avait été créé mais celles-ci ont malheureusement été obturées au cours des années.

De nombreux travaux ont eu lieu afin d’améliorer la qualité de température des lieux en été comme en hiver. Pourtant, quelles que soient ces interventions (installation de radiateurs supplémentaires, de climatisation ou de protections solaires), rien n’y a fait. La température ressentie par les occupants tout au long de l’année continue de générer inconfort et absentéisme. A titre d’exemple, en hiver, un bâtiment isolé est considéré par ses occupants comme étant chaud et confortable à partir de 19° quand un bâtiment non isolé ne l’est toujours pas à 23°.

Modéliser pour anticiper les évolutions et permettre de s’adapter aux usages future

 

Partant de ce constat d’inconfort des usagers, le bureau d’études a modélisé les consommations de chauffage. Plutôt que d’utiliser la méthode traditionnelle de calculs thermiques statiques, il a préféré opter pour une simulation thermique dynamique. Cet outil développé par le Centre d’Énergétique de l’École des Mines de Paris permet de simuler la vie thermique des structures, en conditions réelles, en prenant en compte, sur toute une année :

– la météo des lieux

– la météo des environnements proches et lointains

– les matériaux et composants des bâtiments

– les caractéristiques thermiques proches et lointains des matériaux et composants (par exemple l’ombrage des balcons supérieurs sur les vitrages)

 

Des scénarios d’utilisation ont été définis afin d’approcher au plus près des conditions réelles d’occupation, de consignes de température, de débits de ventilation et de puissances dissipées.

 

D’un îlot tertiaire à un bâtiment remarquable inscrit dans une zone protégée                                               

Révéler et revaloriser la valeur patrimoniale d’un bâtiment

 

La poste Bourseul se situe dans une zone protégée, en centre ville, à proximité de bâtiments inscrits aux monuments historiques ; à l’instar de la maison atelier du maître-verrier Barillet, œuvre de l’architecte Robert Mallet-Stevens datant de 1932.

L’édifice imaginé par Michel Roux-Spitz n’est certes pas inscrit au patrimoine mais pour autant il reste remarquable de par l’usage du béton, novateur pour les années 30 ou encore de par son architecture soignée. C’est pourquoi, les architectes des bâtiments de France et la Commission du Vieux Paris ont été consultés tout au long de l’étude pré-opérationnelle. Cette approche peu habituelle a permis d’anticiper et faire émerger d’éventuels points de blocage.

 

L’isolation, point de bascule

 

L’absence d’isolation génère 25 % des pertes énergétiques du bâtiment et induit des consommations  élevées. Deux solutions s’offrent alors à Poste Immo : une isolation par l’extérieur ou une isolation par l’intérieur. Si la première semble la plus efficace, la moins coûteuse, la plus rapide car les travaux sont réalisables sur site occupé, elle n’en garde pas moins un inconvénient majeur qui est de modifier la façade et le geste architectural initial.

 

Des scénarios comme aide à la décision

 

« Il nous semblait important de défendre la qualité architecturale du bâtiment » explique Sébastien Cord, architecte du patrimoine, c’est pourquoi nous avons proposé à Poste Immo plusieurs stratégies ». Elles se basent sur une réflexion tenant compte des aspects énergétiques, du confort des usages mais aussi de la valorisation financière du bien immobilier et du respect du patrimoine architectural :

– scenario 1 : performance thermique stricto sensu ;

– scenario 2 : compromis entre performance thermique et esthétique du bâtiment ;

– scenario 3 : maîtrise des consommations énergétiques tout en préservant les façades.

 

Tous ces scenarios proposent une réduction minimum de 70% de la facture énergétique actuelle du bâtiment. Tous également s’insèrent dans une vision globale d’amélioration du confort des occupants et des réductions des émissions de CO2 du bâtiment.

 

Une vision globale pour une stratégie sur le long terme

L’objectif de ces scenarios est d’apporter une vision globale dans le temps. « Pas seulement pour les deux années à venir, pas suffisantes pour faire baisser les coûts d’exploitation. Il est important de se projeter dans une dynamique de plus long terme » martèle Paul-Etienne Davier, fondateur de Ai Environnement. Le tableau de bord que nous élaborons pour chaque scénario, poursuit-il, permet cette approche grâce à des outils de pilotage tels que :

– plan pluriannuel de travaux ;

– priorisation des actions en fonction des besoins fonctionnels, de confort ou d’économie ;

– évaluation budgétaire (budgets de fonctionnement et d’investissement) ;

– projection des contraintes réglementaires et environnementales.

 

« Nos expertises techniques et stratégiques pré-opérationnelles nous permettent de proposer à nos clients des leviers d’action pour mieux valoriser leur patrimoine et faire progresser leur classement immobilier international. » souligne Nicolas Letschert, architecte associé au cabinet Alu. « Cette valorisation passe par une rentabilité financière (baisse des coûts d’exploitation, amélioration de la performance énergétique du bâtiment, sobriété énergétique) mais pas uniquement » poursuit-il « La rentabilité sociale en fait également partie avec comme critères la réduction du taux d’absentéisme et l’amélioration de l’image, interne comme externe, de nos clients ».

Avant de conclure « Si ce type de collaboration que nous avons initié depuis un certain temps déjà avec Ai Environnement n’est pas la norme aujourd’hui, il préfigure cependant les projets à venir dans le cadre de requalification et revalorisation d’espace public tertiaire.

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